Inondations

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Situé dans le quartier du Vieux-Montréal, le terrain de l’Ancien Hôpital Général subit plusieurs inondations majeures (notamment en 1789 et 1838), conséquences des crues printanières du Saint-Laurent. Les travaux d’aménagement du port et de la voie navigable du Saint-Laurent ne commencèrent que dès la fin du XIXe siècle pour pallier ce problème.

Voici comment l’inondation de 1789 fut racontée par une sœur :

Dès le 31 décembre 1788, la crue extraordinaire du fleuve couvert en partie de glace pouvait inspirer quelque crainte en donnant à appréhender une forte inondation. Mais se confiant sans doute dans la bonne et sûre garde de la Providence, nos sœurs à l’heure du coucher se retirèrent comme d’ordinaire et allèrent bien tranquillement prendre leur repos sans même s’arrêter à l’idée de mettre au moins une veilleuse en sentinelle pour éveiller la Communauté en cas d’accident. Il est à présumer que tout le monde de la maison avait pour cette nuit-là la paupière appesantie car tous dormèrent d’un si profond sommeil que personne n’entendit l’agitation tumultueuse des grandes eaux du St Laurent qui entremêlées d’énormes glaçons venaient frapper le mur d’enceinte, se frayant partout un passage et pénétrant avec rapidité dans toutes les bâtisses de l’Hôpital et submergeant les alentours. Mère Lemaire qui n’était encore qu’une toute jeune sœur fut la première à s’éveiller au bruit inaccoutumé qui soudain frappa son oreille; elle fit un saut hors de son lit, et regardant par l’une des fenêtres qu’elle ne fut pas son étonnement d’apercevoir l’eau de tous les côtés, les cours, les dépendances, tout était inondé, tandis que le rez-de-chaussée même de la maison menaçait de devenir rien moins qu’un vaste lac. Quoiqu’il ne fut qu’environ que trois heures du matin, notre Sr Lemaire crut sans scrupule être en devoir pour cette fois de sonner le réveil et de donner ainsi le signal d’alarme’. (…)

Après que nos Sœurs eurent pourvu à la sûreté de tout le personnel de l’Hôpital et qu’elles eurent mis le peu de provisions qu’elles possédaient à l’abri de l’élément envahisseur, il leur fallait songer à sauver les animaux encore grelotant dans l’eau glacée qui avait gagné si grand le terrain et qui était montée si haute qu’il n’y avait plus moyen d’atteindre les bâtiments dans l’embarcation: les engagés improvisèrent incontinent des radeaux à l’aide desquels ils retirèrent les chevaux des écuries, les emmenèrent à la maison pour ensuite les installer dans l’ex-salle des petits enfants.’

(…) ‘Comme le premier étage était complétement inondé, que le second et le troisième étaient complétement encombrés, on ne vit pas d’autre moyen que de faire escalader  [les vaches] au quatrième et de les loger dans un petit grenier au-dessus de la nef de l’église.  (…) Les pauvres bêtes n’ayant pas été admises au Conseil, ne comprirent rien à ce qu’on prétendait exiger de leur part, aussi se montrèrent elles incontinent d’une humeur si récalcitrante que plus d’une fois les plus courageuses furent tentées d’abandonner l’entreprise et ceux qui eurent à leur donner les premières leçons pour leur apprendre à monter les escaliers ne l’oublièrent jamais de leur vie’.

Source : Archives des Sœurs Grises de Montréal-G02, A, 18 – MM.300, Inondations de 1789

Place d’Youville, vers 1869, Archives Photographiques Notman, MP-0000.2856, Musée McCord d’histoire canadienne
Archives des Sœurs Grises de Montréal, G02, A, 25-MM.378 Inondations de 1838, par Sr Beaubien, s.g.m, Supérieure Générale (extraits)